Il fait partie de ces figures incontournables que l’on croise aux abords des terrains de Midi-Pyrénées chaque semaine. Une carrure imposante, une voix à la Barry White, un sourire généreux. Zackery Jones est l’une des personnalités les plus marquantes de notre région. Pour autant, si beaucoup l’ont déjà croisé ou côtoyé, qui connait réellement son parcours ? Avant d’être installé dans le Lot et d’avoir porté les couleurs de CahorSauzet et de coacher Pradines, Zack a bien failli se retrouver dans la Grande Ligue, la NBA. Retour sur une carrière bien remplie, en deux parties.
Les années lycée
Initialement, rien ne prédestinait Zackery Jones à vivre dans le Lot. Ni même à faire une longue carrière dans les premières divisions françaises. Et encore moins à flirter avec la NBA.
En fait, Zack Jones est ce que les américains appellent un « late bloomer », c’est-à-dire un joueur qui se révèle tardivement, mais dont les progrès sont fulgurants. Remettons dans le contexte : Zackery Jones est né en 1953 à Oklahoma City, capitale de l’Etat du même nom. Il est issu d’une famille nombreuse de 11 enfants. Il est le 10ème enfant de la fratrie, et le 8ème garçon. Zack aurait du avoir un frère jumeau, mais celui-ci ne survivra pas à la naissance.
Dès l’âge de onze ans, il quitte le domicile familial et grandit à Tulsa, dans une institution pour orphelins dénommée la Tulsa Boys Home. Son intérêt pour le sport lui est transmis par ses sept frères aînés, qui ont tous connu des performances dans différents sports comme le foot américain, le base-ball, l’athlétisme et bien sûr le basket.
Ses deux frères les plus proches en âge étaient Stanley et Jerry. Le premier, sept ans plus vieux que Zack, est un athlète accompli, tant au basket qu’au base-ball, qui aurait pu connaitre une carrière professionnelle en NBA ou même en MLB (Major League Base-ball). Il partage avec Zack sa grande taille (2,05 m), alors que Jerry, septième garçon de la fratrie, ne dépasse pas le mètre soixante-quinze.
Entre 14 et 16 ans, Zack passe ses vacances d’été dans la ferme de la Tulsa Boys Home. Les week-ends sont consacrés au Rodéo, une activité hautement physique, mais le reste de la semaine n’est pas de tout repos pour autant: avec ses amis cow-boys, pour se faire un peu d’argent de poche, il ramasse les bottes de pailles dans les champs et les ramène dans les granges, chacune faisant 15 kilos…
Le travail à la ferme lui permet ainsi de se renforcer musculairement, portant de lourdes charges tout au long des journées ensoleillées. Son développement physique couplé à sa croissance (10 centimètres pris entre février et octobre 1968) lui permet de se faire remarquer par le coach Eddie Sutton, futur grand coach universitaire (deux final four NCAA avec deux équipes différentes), qui dirigeait le programme basket de Tulsa Central High School.
C’est ainsi que Zack se retrouve en 1968-1969 dans l’un des 10 lycées de la ville de Tulsa, Oklahoma, en plein centre-ville. C’est un jeune homme discret, voire silencieux, mais avec une carrure imposante, et son surnom d’alors, « la montagne », semble tout à fait approprié.
Lors de cette première saison, Zack ne fait pas partie du groupe « varsity » (équipe principale du lycée), et joue dans l’équipe B, composée de joueurs en première année de lycée:
« A cette époque, j’avais tellement changé physiquement que j’avais totalement perdu mon jeu. Pour aller sur le terrain, nous descendions les 23 marches des tribunes. Pendant que l’équipe varsity s’entrainait, je shootais des lancers-francs sur le côté. Chaque lancer-franc raté, je faisais un aller-retour dans les escaliers. »
En complément de ses entrainements avec la deuxième équipe du lycée, et de ses séances individuelles pendant les entrainements de l’équipe première, Zack travaille son jeu chez lui, et devient un joueur majeur de l’équipe B qui remporte cette année-là le titre de « City Champ ».
« J’avais 16 ans, il y avait 4000 élèves dans mon lycée, et les « seniors », ceux qui sont en dernière année, traditionnellement, sont prioritaires pour intégrer l’équipe. En 1969, l’équipe A de mon lycée, qui était composée de seniors et d’un seul junior est devenue championne de l’état d’Oklahoma. Pendant ce temps-là, je jouais avec l’équipe B de mon lycée, composée de jeunes joueurs de mon âge. »
L’éclosion d’un talent
C’est au cours d’une summer league organisée sur la ville que Zack se révèle, avec 14 points marqués en 5 minutes pour le gain d’un match. Malheureusement, il se casse le pied au troisième match et met du temps à revenir. Pour autant, la confiance est là, et à son retour, il joue des coudes, littéralement, pour gagner sa place, et intègre l’équipe varsity de Tulsa Central. En fin de saison, l’équipe finit 3ème de l’état d’Oklahoma, sortie en demi-finales par les futurs champions.
Sa dernière saison au lycée est celle de la consécration, Zack finissant meilleur marqueur de son équipe, avec 13 points par match, MVP du tournoi final et champion de l’état d’Oklahoma. Il est non seulement nommé dans la All-State Team, parmi les meilleurs joueurs de l’Oklahoma, mais également Sunset All-American, soit l’un des 100 meilleurs joueurs du pays! Il est sélectionné dans un « all-star game », où le nord et le sud de l’Etat s’opposent, et à l’issue de cette rencontre, une sélection des 10 meilleurs joueur de l’Etat d’Oklahoma, dont il fera partie, sera opposée à une sélection du Texas, pour le Faith 7 Bowl.
En raison de résultats scolaires un peu justes, Zack ne peut intégrer immédiatement l’University de Tulsa pour poursuivre ses études. Il est contraint de passer deux saisons dans un Junior College, à Crowder dans le Missouri, un Etat limitrophe de son Oklahoma natal.
A l’issue de ses deux saisons en JuCo, il rentre enfin à l’Université de Tulsa, en compagnie du l’ailier shooteur Ken « Grasshopper » Smith. Celui-ci évoluera plus tard une saison aux Spurs de San Antonio, avant de jouer le reste de sa carrière aux Pays-Bas, puis en Belgique, jusqu’à l’âge de 46 ans !
En NCAA, les performances de Zack Jones lui permettent d’être retenu dans la « Missouri Valley Conference » All-Star Team, et de participer ainsi à une tournée d’un mois au Brésil, face à des équipes évoluant en première division nationale du pays hôte.
Lors de ses deux saisons à Tulsa, Zack se fait un nom, en particulier grâce à un match télévisé :
« Nous avons joué face à Louisville, une des meilleures universités du pays, devant 25 000 spectateurs ! Le match était retransmis à la télévision, et j’ai mis 20 points ! A cette époque, on me comparait à Wes Unseld (pivot des Washington Bullets en NBA), et les scouts pensaient que je pouvais décrocher une place lors de la draft ».
En effet, Zack avait de réelles chances d’intégrer la NBA, sachant que les équipes de Portland, de Washington et surtout de Philadephie étaient intéressées pour le recruter à la sortie de son cursus universitaire avec Tulsa. Les autres ligues professionnelles américaines étaient aussi intéressées, mais aucune n’avait le pouvoir d’attraction de la NBA, viable économiquement et solide sportivement. La ABA (American Basketball Association) était en train de disparaitre (quatre équipes ont fusionné deux ans plus tard avec la NBA) et la CBA (Continental Basketball Association) ne permettait pas de vivre seulement du sport, tant les salaires étaient dérisoires et les conditions spartiates.
Aux portes de la NBA
« J’ai rejoint le camp d’entrainement pré-draft des Sixers. Nous étions 125 au départ, et chaque jour, le staff renvoyait un certain nombre de joueurs chez eux. Au bout d’une semaine, nous n’étions plus qu’une vingtaine. Alors que nous arrivions à l’entrainement, et que je pensais pouvoir avoir une chance d’être drafté, le staff nous annonce l’arrivée aux 76ers de Dr J, Julius Erving (le Jordan des 70’s) et de Georges McGinnis, une autre star de la ABA, et qu’il n’y aura donc pas de place pour d’autres joueurs. »
Revenu au point de départ après avoir touché son rêve du bout des doigts, Zack loupe le coche une deuxième fois, bien malgré lui.
« A l’époque, nous n’avions pas tous les moyens de communication actuels, et pour contacter quelqu’un, ce n’était pas toujours évident. Il y avait un match de gala organisé dans lequel l’un des joueurs les plus en vue n’a pu participer pour cause de blessure. J’ai été invité pour le remplacer, mais je n’ai pas eu l’information a temps et je n’ai pas pu m’y rendre. Le joueur en question a été drafté plus tard par les Kansas City Kings (désormais à Sacramento). C’est un regret, car ce genre de match all-star me convenaient bien, j’arrivais à me mettre en valeur, sans être bridé ».
A nouveau sur le carreau, Zack reprend le cours d’une vie normale, travaillant dans les assurances. Sans savoir que d’autres opportunités liées au basket allaient lui faire traverser l’Atlantique…
Galerie photo
[…] Le rêve NBA s’est envolé. La porte s’est refermée et la carrière de Zack ne se déroulera pas dans la Grande Ligue. Cependant, pour lui, le basket n’est pas qu’un sport, c’est un mode de vie. C’est un peu par hasard qu’il va traverser l’Atlantique, en 1977, pour jouer en France… et s’y installer définitivement. Suite et fin du parcours de Zack Jones, retrouvez la première partie en cliquant ici […]